Coup de tête II

Publié le par Schweinnie

le retour de la vengeance de la suite

 

 

Maintenant, les images du coup de boule de Zidane à Materazzi ont été vues par quasiment la Terre entière et peut-être même sur Krypton, mais le traitement de cette affaire par les médias français semble lui bien particulier, avec une mauvaise foi partisane qui ne semble pas cadrer avec la rigueur journalistique qu'on attend d'eux. Déjà, les commentaires en direct de Gilardi valaient le détour par leur bêtise. Dans un premier temps, à la vue d'un Italien à terre, il accuse immédiatement Trezeguet et non l'autre présent dans le coin puis, à la vue du ralenti, se met en boucle avec "oh non", comme une midinette apprenant le départ de Steven des Alliage. Ben oui, Zidane est Dieu, alors il ne peut pas commettre un tel acte. Commence alors des prières pour le moins malsaine, comme l'arbitre et le chef de gare le plus proche n'avaient rien vu, Gilardi ne cesse d'espérer à voix haute qu'aucune sanction ne soit prise, bref, qu'un acte de violence caractérisé reste impuni. Puis, le quatrième arbitre raconte au principal ce qu'il s'est passé et la juste décision est prise. Sauf qu'apparemment, le quatrième arbitre a vu l'action sur un écran télé et donc, qu'une aide vidéo a été officieusement utilisée. Tout de suite, Larqué hurle que ça n'est pas normal, qu'on n'a pas le droit, que ça ne s'est jamais fait. Faux, bien sûr. D'abord, pendant la compétition, sur M6, Alain Sars avait raconté qu'il arrive assez souvent que le quatrième arbitre, aidé d'un poste télé, conseille l'arbitre principal dans l'oreillette, ce serait donc assez courant même si on ne le reconnaît pas officiellement. De plus, les cas soupçonneux d'utilisation non officielle de la vidéo en match existent, même si on les signale rarement, sans compter de l'utilisation a posteriori de la vidéo pour sanctionner les actes de violence (comme le coup de coude de Desailly à Morientes lors de Monaco - Chelsea en 2004). D'autant que, dans ce cas, une sanction ultérieure aurait été ridicule vu que c'était le dernier match de Zidane. Et que voulaient Gilardi, Larqué et les autres (dont Domenech dont le sens du fair-play est renommé, hum, hum) qui protestent sur cet aspect précis ? Qu'une violence, visible de tous, ne soit pas sanctionnée ? Et ce sont les mêmes qui se plaignent sans cesse d'erreurs d'arbitrage ! Cherchez la logique.

 

D'ailleurs, a-t-on le droit en France de critiquer Zidane et Henry, les deux icônes du football français ? Tous les commentaires dans la presse sur la performance du Gunner en finale sont dithyrambiques, quand bien même il n'a pas fait grand chose de bon balle au pied, qu'entre les mauvais placements, les mauvais choix de passe et les tirs au pigeon, il n'a pas apporté quelque chose dans le jeu. La seule fois où il aura éliminé était quand les Italiens s'étaient arrêtés car Malouda restait par terre (imaginez les commentaires si Henry était hollandais), la grande partie du match, il aura certes beaucoup couru et essayé, mais quasiment sans réussite. Un peu comme Tony Vairelles, mais Henry, en icône publicitaire et médiatique, n'a pas subi de critiques. De même, Zidane est perpétuellement décris comme un dieu vivant, il réunit toutes les qualités de la Terre et n'a aucun défaut. Et dans le cas de Zidane, les nombreux soutiens publicitaires font qu'on y va mollo sur les réserves (on ne va pas à l'encontre des annonceurs, surtout quand une très grande partie des publicités du moment reprennent la popularité de Zidane), ainsi que sa popularité immense. En effet, il est rare dans la presse, surtout sportive, d'aller à rebrousse-poil d'une opinion majoritaire ou, du moins, qui s'exprime le plus fort. Ça inclut l'obsession de la chasse aux arbitres, la part oppressante de l'OM et du PSG dans les diffusions de match (les autres clubs français engagés l'an dernier en Coupe de l'UEFA, Monaco, Lens, Auxerre, Lille et Strasbourg, n'ont jamais été diffusés, même quand les affiches étaient plus alléchantes que les matches de l'OM, on retrouve cette injustice dans les retransmissions de Ligue 0-0), la flatterie de tous les clichés nationalistes (avec les destructions en règle de tout ce qui a le tort d'être étranger et adversaire des Français) ou régionalistes (la presse régionale appliquant ce principe à son échelle, à l'exception du Parisien qui, lui, n'a de cesse de critiquer le PSG en toute occasion). Zidane étant la personnalité préférée (ou presque) des Français, on ne fera donc que le louer et on passera sous silence tout ce qui peut nuire à son image de saint. Le pire, c'est que Zidane lui-même n'y est pour rien dans cette propagande et qu'il n'a jamais prétendu être le guide suprême (ce qu'il n'est pas, c'est simplement un génial joueur de football et c'est déjà très bien) que la presse a créé. Ça, plus la manie de ne jamais critiquer les morts ou mourants (ce qui est le cas du joueur Zidane), ça donne du grand n'importe quoi. Je citerai comme exemple un commentaire sur le reportage de Stade 2 consacré à Zidane lorsqu'il a annoncé la fin de sa carrière, commentaire rédigé par l'écrivain le plus talentueux selon moi, c'est-à-dire moi-même.

 

Mais le foot, c'est aussi l'arrêt de Zidane, du coup, on a eu droit à un portrait de Tif et Tondu à la fois. C'est très simple, c'est Dieu, partout où il va, il fait des miracles, les enfants, touchés par la grâce, ont les yeux qui brillent, les femmes se jettent nues contre sa voiture en hurlant leur amour comme on crache un glaviot resté trop longtemps bloqué dans la gorge, les vieux se remettent à marcher, le sourd retrouve la vue, Jacques Faizant ressuscite et la circulation est fluide sur le périphérique ouest. Hélas, un oubli, pas d'extrait de Zinedine, l'inoubliable chanson d'Obispo. Accessoirement, pas de mention non plus de son nombre record (pour son poste) de cartons rouges, de ses deux dernières années madrilènes, de ses bisbilles avec Platini, du dopage à la Juventus, d'avoir été sous les ordres de Rolland Courbis à Bordeaux, du poids de ses sponsors dans sa communication.

 

 

Donc, forcément, le traitement dans la presse (pas n'importe laquelle, j'inclut là notamment les JT des grandes chaînes, qui font passer les incidents entre Israël et le Liban au second plan) a été grotesque. Déjà, les voila qui présentent ce match comme un vol, donc les résumés du match sont largement biaisés (le but refusé à Toni et la tête de Toni sur la barre passent à l'as, de sorte que ne subsiste que les actions françaises). Ça a commencé dès le lendemain de la finale maudite, dans laquelle il était bien précisé que le geste de Zidane est honteux mais que bon, quand même, Materazzi, c'est un bel enfoiré. On remontre des images de Materazzi qui pète un nez d'un Parmesan avec son coude, qu'il a plein de tatouages sur les bras, et on est censé en conclure qu'on a le droit de le taper. Dès le soir même, la question de savoir ce que Materazzi était au centre des débats (avec sur TF1 une réponse de Bernard Tapie, en vertu d'on ne sait quelle qualité, évoquant une insulte à la mère de Chaussée aux Moines), et ce grand mystère occasionnait des longs reportages dans les JT (c'est vrai que c'est une question essentielle sur la marche du monde). Selon les médias, les insultes variaient de l'insulte raciste à la familiale, mais avec à chaque fois la même docte assurance, mais sans jamais préciser le comment de ces certitudes, sans doute avaient-ils un micro au bout d'une perche géante pour entendre la conversation. Car il y a eu forcément provocation ignoble de Materazzi pour que Zidane, qui est un exemple, un modèle, un Bisounours, une réincarnation de Teletubbies, réagisse ainsi. Sauf que Zidane, c'est aussi 14 cartons rouges dans sa carrière, excusez du peu : un coup de poing à Desailly, une baffe à Fink, un coup de boule (déjà) à un joueur de Hambourg, une bagarre à Martigues, un Saoudien piétiné, deux jaunes contre Villareal visibles sur grand écran, deux jaunes contre la Roma avec sur le deuxième un sublime plongeon dans la surface ... Un saint, en effet, et comme le prouve la citation, il est tout autant idiot de le découvrir le 9 juillet que de persister à le nier. Qu'on soit bien clair, je ne hais pas Zidane. D'abord, c'est un joueur génial. Ajoutez à ça son goût pour la baston et les produits qu'il a pris à la Juve (et au Real ? N'oublions pas l'opération Puerto) et qu'est-ce qu'on obtient ? Génie, drogue et violence, mais c'est une vedette punk, en vrai ! Un Cantona en mieux et ça, ça justifie que je l'adore, Zidane.

 

Le point d'orgue de cette agitation (au fait, si Ribéry avait cadré sa frappe, si Trezeguet étaient entré plus tôt, si Henry avait été plus efficace dans le geste, si la France avait mieux défendu sur les corners, on aurait aussi pu gagner, mais ça, on ne le mentionnera pas) est bien évidemment le moment où Zidane s'est enfin exprimé. Sur Canal+, son sponsor. Hasard, sans doute. Michel Denisot aura confirmé pour l'occasion qu'il est un faux-cul de première, lorsqu'à propos de la provocation de Materazzi, il dit que des tabloïds anglais et espagnol (le mot tabloïd étant prononcé avec un dédain ostensible) ont essayé de lire sur les lèvres les propos. Sauf que le JT de Canal+ l'a fait aussi ! Doit-on en déduire que le traitement de l'information par Canal+ (mais aussi France 2 et TF1) est digne d'un tabloïd anglais ? Finalement, Zidane a répondu, sa mère et sa soeur ont été insultées, mais ça n'était pas à caractère raciste. Toutefois, il persiste et signe, il ne regrette pas son geste car ne pas cogner quand on vous insulte, pour lui, ça veut dire qu'on est faible. Ecoute, petit (tu permets que je t'appelle petit ? Et que je te tutoie, aussi ?), renseigne toi sur des types comme Martin Luther King ou Gandhi et réfléchis un peu.

 

Point de vue du grotesque à force de stupidité, le summum est, sans surprise, atteint par Stade 2 mais attention, on arrive à un point vraiment impressionnant. Ah, au fait, je rappelle qu'on parle là du service public, tant qu'à faire. D'abord, on a un portrait au vitriol de Materazzi, joueur fourbe, violent, provocateur, Lionel Chamouleaud ajoutera qu'on n'a pas l'impression qu'il fait le même sport que Zidane. C'est pourtant le fruit d'un grand travail journalistique puisque, en cherchant sur Google (!!!!), ils ont trouvé un site qui collectionne tous ses actes répréhensibles. Sauf qu'on pourrait en faire autant sur Makelele (vous vous souvenez de son effondrement au sol lors de Monaco - Chelsea ?), Vieira, Sagnol, Barthez et même Zidane lui-même. Mais cela, ça demande de l'esprit critique et de la réflexion, donc on ne le verra pas. Ils ont pourtant demandé l'avis de personnes éclairées : des supporters venus applaudir Zidane au siège de la FFF (donc, des gens objectifs et en plus, des témoignages pas du tout triés sur le volet) ainsi que Mouss Diouf et Guy Forget. Un autre reportage (le plus incroyable, c'est qu'il n'y a pas eu un mot sur la victoire de Mauresmo à Wimbledon, victoire indiscutable, en plus) porte sur la provocation et là, attention, les exemples montrent toujours des étrangers dans le rôle du provocateur. Les Français ne sont jamais que des victimes, jamais ils ne provoquent les adversaires ! Pour savoir ce qu'a dit l'ignoble Materazzi, ils ont réquisitionné un sourd brésilien pour arriver au même résultat qu'avant et de là, ils en concluent que Materazzi doit être expulsé plus que Zidane. C'est limite si on ne doit pas rétablir la peine de mort pour l'occasion ! Au passage, on note en vitesse un journaliste italien qui dit que Zidane aurait insulté (sur la base de la lecture sur les lèvres, encore une fois) un arbitre au cours de cette Coupe du Monde, mais on ne s'appesantira pas dessus.

 

Au lieu de cela, les voilà qui, dernier règlement de la FIFA à l'appui, réclament ni plus ni moins que la disqualification de l'Italie pour cause d'insulte raciste. Déjà, Zidane lui-même (ou alors c'est un menteur, mais il faut le dire, dans ce cas) a dit que l'insulte n'était pas raciste, donc la montée sur les grands chevaux est hors-sujet, mais le plus fort dans l'histoire est que le journaliste croit bon d'ajouter qu'il n'est pas question de récupérer un titre perdu pour la France mais de lutter contre un fléau et blablabla. N'importe quoi, pour sur. Déjà, et ça vaut aussi pour ceux qui vitupéraient déjà avant le match contre l'Espagne à cause des propos d'Aragones sur Henry (et qui oubliaient qu’Eto’o avait alors défendu publiquement Aragones des accusations de racisme) extrapolés à tous les Espagnols et en permanence, il faut rappeler comment les actes de racisme au haut niveau sont sanctionnés en France. Lors d'un PSG - Bastia, l'entraîneur corse Ciccolini avait traité Lorik Çana de "sale Albanais de merde" sans recevoir de sanction lourde, ce qui met bien la France en position de juger tous les autres pays. De même, le boxeur Jérôme Thomas aurait aussi insulté de cette façon des partenaires en équipe de France de boxe amateur sans être puni, et d'autres cas pourraient venir facilement (comme certaines banderoles vues tribune Boulogne ou les polyphonies corses dont avait été victimes Franck Matingou et le désormais fameux Pascal Chimbonda). En fait, c'est à croire que le seul tort des étrangers, c'est qu'ils sont tous racistes. De plus, si on ajoutait les médias dans la possibilité de sanctionner les actes ou propos racistes par des disqualifications, on en a pour un siècle de privation, entre les dénigrements haineux des Portugais, des Allemands, des Espagnols, des Suisses et maintenant des Italiens, sans parler des fulgurances géopolitiques de Thierry Roland. Enfin, si c'était la France qui avait gagné après un coup de boule de Del Piero répondant à une insulte de Makelele, vous pensez qu'il y aurait eu un tel tintamarre dans la presse française ? Certainement pas. Au fait, juger de la gravité d'un acte selon la nationalité de la victime et du coupable, ça ne serait pas un peu du racisme, ça aussi ?

Publié dans telepoubelle

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N
Encore un(e) cretin(e) qui raconte nimp, reflechi 2 seconde sans cervelle, tu crois que "lens" a des supporters tu crois qu'M6 ou TF1 vons gacher 2h d'antenne pour eux (ké utopiste debile)La vie c'est le marché zidane est une icone ainsi qu'henry le football francais en souffrirai enormement si y'avais pas de tel acteurs tout ca c'est marketing zidane est un bon joueur mais l'engouement des francais a son sujet la propulsé au sommet mondialement donc reflechi espece d'ecervellé tu irai descendre ta vache a lait ? franchement y'en a avec leurs 10 paragraphes pensent qu'ils ont un cerveau, mais c'est de la merde qui y tourne a l'interieur
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S
Il y a dans cet article un ton un peu plus moralisateur que satirique, mais bon, c'est pas faux non plus.Et nous dire que les médias sont orientés, subjectifs et pas toujours professionels, ce n'est pas une découverte.J'attend qd même les prochains récits des aventures audivisuelles majoritairement francophones (en esperant que le temps passé pour nous devant un ecran ne soit pas astronomique)....
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V
jai decouvert ton blog par hasard je le trouve super, moi aussi ça me saoule le culte inconditionnel de zidane en france.<br /> tu écris vraiment bien et tu as beaucoup d'humour, bravo!<br /> non je ne suis pas prof :)
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G
Ben voilà, t'as exprimé tout ce que je pensais, bonne continuation. Excellent blog. C'est pou rça que j'regarde les matches en écoutant de la zik sur mon mp3, j'en peux plus de TF1 et consorts, c'est le suicide direct sinon!!!
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S
j'attendais fébrilement vos commentaires sur le nouvel opus de l'ile de la tentation... ce n'est pas pour aujourd'hui mais votre article sur Zidane et la Coupe est excellent ... NB : j'adore l'expression "se met en boucle avec "oh non", comme une midinette apprenant le départ de Steven des Alliage." je le placerais à l'occasion d'une garden party du 14 juillet 06.
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