Premier temps intermédiaire

Publié le par Schweinnie

et sans Jean-René Godard !

Comme ça fait une semaine que je n'ai rien posté, autant faire un petit tour d'horizon de la rentrée télévisuelle, avec son cortège de nouvelles émissions et nouvelles formules. Je ne reviens pas sur l'Arène de France au sujet duquel je me suis déjà exprimé, ni sur Esprits libres, reprise de Campus avec les mêmes avantages (apport culturel, débats, promotion d'oeuvres et artistes non commerciaux) et les mêmes inconvénients (horaire tardif, parisianisme).

Dans les émissions restées en place, on peut aussi citer Vis ma vie. Laurence Ferrari, partie sur Canal+, c'est Flavie "Minardi" Flament qui la remplace, avec deux changements. Le premier concerne le fond (pas celui qu'on touche), on a deux "reportages" (oui, là, je me sens obligé de mettre des guillemets), l'un avec une star qui fait la profession d'un quidam (et qui montre son bon coeur, cela va de soi) et l'autre avec un patron qui fait le boulot des employés (et qui découvre les affres de la condition prolétarienne). Le deuxième changement concerne la forme, fini le plateau sur lequel tous les participants se retrouvaient et tiraient un bilan à tête reposée de leur expérience, Flavie Flament se terre dans les coulisses pour tout observer et recueillir les impressions comme en temps réel. Déjà qu'avant, la personne qui se retrouvait dans le rôle de tout un chacun était suivie par une équipe télé, avec la discrétion et le naturel que ça provoque sur les autres gens, maintenant, on a en plus à dix mètres Flavie Flament et une autre équipe télé, on y croit encore plus. On notera la semaine dernière la participation de Natacha Saint-Pier en infirmière, donc il y a des gens qu'on a amenés à l'hôpital dans le cirage et à qui on leur dit, voyant une personne, "regardez, c'est Saint-Pier". C'est malin, ça ! Ça va les rassurer !

Maintenue en place aussi, Le grand journal, comme l'an dernier, comme l'année d'avant, rien ne change. Denisot est toujours aussi obséquieux, les chroniqueurs (Laurent Weil, Arianne Massenet, Frédéric Begbeider, Jean-Michel Apathie et une dernière dont je ne me souviens jamais le nom) restent lisses et consensuels. Les invités ont tout juste le temps de placer quatre phrases en rapport avec la raison de leur venue, bref, l'émission reste un joyeux remplissage entre les séquences. Du coup, l'intérêt reste dans le Zapping, le Petit Journal et tout le reste, avec une nouveauté grâce au recrutement (et c'est une bonne pioche, d'ailleurs) dans le vivier du Jamel Comedy Club, en patientant entre temps avec la troupe de boy scouts attardés. Sinon, les Guignols de l'info ont une bonne blague, en ce moment, ils en sont fiers, on y a droit depuis trois semaines : Sarkozy, il est petit. Comme les Guignols, la nouvelle Miss Météo se veut drôle mais tourne sur les mêmes blagues, on a regardé une journée, on peut revenir dans une semaine, on n'aura rien raté. Et quand il y a un ton discordant, même s'il est humoristique, ça tique dans la machine. Par exemple, quand un comique anglais vient vendre son film, faux documentaire sur un journaliste kazakh, Borat, où les gens de l'est sont tous homophobes, machistes, arriérés, truquent l'Eurovision et le Ballon d'Or et jouent au foot sur des champs de patates en pente. Donc, il est venu en Borat et a joué son personnage dans son cours passage de l'émission mais à chaque intervention (comme, désignant Ariane Massenet, "mais cette femme, ce n'est pas la vôtre ? Mais pourquoi la laissez-vous parler ?"), Denisot se sentait obligé d'ajouter "ha ha ha, c'est de l'humour, désolé". Alors, soit on veut parler de l'humour et on invite le comique en tant que tel, soit on joue sur la supercherie et on prend Borat, mais là, on est dans la tentative d'humour méchant qui ne s'assume pas et c'est encore plus pathétique qu'un sketch de Muriel Robin.

Dans tout ça, il y a des émissions que je n'ai quasiment pas regardées, mais oui, mais oui, la faute à la concurrence. De Dimanche+, je n'en ai vu que le piège de Strauss-Kahn et encore, c'était via le Zapping. Je rappelle pour ceux qui sont passés à côté, Strauss-Kahn est suivi par une équipe de Canal, il va se rendre dans un grand magasin de disques (du style F**C ou V****n) et s'isole avant avec son conseiller en communication, mais le bourricot, il a oublié de virer son micro-cravate, donc tout est enregistré. On entend bien l'autre lui dire d'aller prendre un disque de Coltrane (en lui précisant "c'est du jazz") puis d'aller demander à un vendeur où est "Zidane, il va marquer", qu'il veut offrir à son petit-fils. But de l'opération de com' : renforcer l'image d'intellectuel de DSK tout en lui donnant un air familial proche du peuple. Bon, là, évidemment, ça tombe à l'eau. Quant au gros de l'émission, je ne peux rien en dire, il y a Arrêt sur images en face, mais on peut déjà voir qu'il y a eu plus d'irrévérence envers l'invité que dans six ans du Vrai journal.

Quasiment pas vu non plus Toute une histoire, sorte de Ça se discute raccourcis ou Confessions intimes soft. Mais à la même heure, il y a Le journal de la santé et là, Delarue ne peut pas lutter. Je suis accroc aux jeux de hasard, Je suis fan de Joe Dassin ou Je dors avec la barbe en dessous de la couverture, ça ne vaut pas un bon dossier sur la constipation. Dans le dossier, on y trouve un reportage de témoignage, comme chez Delarue, mais sur un thème qu'il n'a jamais osé aborder, on a la mère de famille qui raconte que son fils de quatre ans ne faisait plus caca, qu'il fallait chercher ça à la main, que ça saignait et tout. Ensuite, un docteur spécialisé vient répondre aux SMS du style "ma fille ne fait plus caca que par billes dures, est-elle constipée ?", très instructif. Et parfois, rien ne vaut mieux qu'une illustration par l'exemple, ça nous permet ainsi d'admirer (à 14H, c'est-à-dire à une heure où certains mangent ou sortent de table) de magnifiques images d'opération d'une fistule anale. Thank you, la 5 !

Une vraie nouveauté, pour la peine, sur France 3, tous les soirs, Ce soir ou jamais. Pas facile à suivre au quotidien, du fait d'horaires torturés sévèrement, c'est en deuxième partie de soirée mais le Soir 3 doit impérativement débuter à 23H, ce qui fait une grosse coupure pendant l'émission, à un instant variable. Elle se mérite aussi par l'absence de mise en scène triturant le cerveau : le public est silencieux, les intervenants parlent chacun leur tour sans élever la voix, pas de coupure pub, l'animateur ne joue pas faussement l'enjoué, l'intrigué, le scandalisé, mais se contente de poser des questions, de répartir la parole et de présenter les invités. Rien à voir avec le gros des émissions actuelles, on dirait une émission d'avant (et c'était mieux avant). Du coup, avec tout ce cadre, on est obligé d'écouter ce qui se dit, et en plus on est plus réceptif aux idées exprimées qu'aux annonceurs publicitaires ou aux produits à vendre. Vraiment, on se demande ce qui a pu passer par la tête de Frédéric Taddéi (pourtant ancien produit d'Ardisson) pour faire une vraie émission culturelle ! En plus, il ose inviter des gens qui ont des choses à dire mais qui s'expriment aussi pour échanger des idées (donc, qui sont réceptifs aux interlocuteurs), pas de commercial bas de gamme. Par conséquent, quand on regarde l'émission, le seul moyen de ne pas apprendre, c'est de se focaliser sur le nombre de "euh" prononcés par Taddéi.

Même horaire, mais rien à voir sur la forme, T'empêche tout le monde de dormir, avec Fogiel à la baguette, le mardi en deuxième partie de soirée. Cette fois, les accusations de plagiat contre Fogiel sont justifiées, cette émission est une évidente copie d'une autre, le même design du plateau, les mêmes invités, la même alternance interview d'invité / court reportage, le même public qui applaudie à tout va, les mêmes pseudo-débats expédiées en cinq minutes entre l'interview de gens connus anonymes et de squatteurs du petit écran, le même animateur. Oui, en fait, pour ne pas avoir de procès, Fogiel ne s'est vraiment pas fait chier puisqu'il s'est plagié lui-même, T'empêche tout le monde de dormir est l'exacte réplique de Tout le monde en parle, il a juste changé le titre et largué du lest (avec Guy Carlier dans le rôle du lest). Autre changement, les SMS sont moins visibles, comme filtrés par une assistante qui intervient de temps en temps pour faire le point sur les meilleurs vannes, mais avec un dix minutes de retard, ce qui fait qu'on était déjà passé à un autre invité. Le rôle du chroniqueur est maintenant donné à André Manoukian, ça plus l'album de Marianne James et la comédie musicale de Dove Attia, on a les plus insupportables membres du jury de Nouvelle Star même en dehors de l'émission. Vraiment, on n'est plus tranquille chez soi !

En parlant de plagiat, Ardisson (qui s'y connaît en plagiat, puisqu'il s'est déjà fait condamner pour cela) avait accusé Fogiel de l'avoir copié, mais l'émission qu'il produit pour Ruquier pourrait bien subir les mêmes foudres. Déjà, le titre, On n'est pas couché, reprend le même champ lexical que le bidule de Fogiel et la mise en forme, elle ressemble fortement à La méthode Cauet : des invités autour de deux grandes tables qui se font face, un décor bleu, l'animateur à un bout qui invite chacun à tour de rôle sur un fauteuil à côté de lui. Enfin, bon, l'émission en elle-même, c'est grosso modo celle d'Ardisson, le cul et la mégalomanie remplacés par les jeux de mots tirés de l'Almanach Vermot. Car Laurent Ruquier tient à la fois le rôle de l'animateur et celui du rigolo de service, mais les vannes sont plus grand public que celles de Baffie et faciles à comprendre un samedi soir. Pour le côté culturel, il dispose de deux consultant qui ne sont pas sans rappeler les papys du Muppet show : Michel Polac pour jouer le vieil aigri cultivé de gauche et Eric Zemmour pour faire l'anar de droite qui n'est pas d'accord. Quant à l'humour, Ruquier dispose là aussi de deux aides : Florence Foresti qui fait une imitation (méritoire car ce n'est pas son domaine) par semaine et Jean-Luc Lemoine pour deux vidéo-photo-rédacs, une sur un invité et l'autre sur les questions prises dans la rue. Car quand c'est Ruquier qui se charge de l'humour, ça n'est pas aussi aérien, puisqu'il se compose à la fois des meilleurs jeux de mots faits dans On a tout essayé (qui eux-mêmes sont une sélection des meilleurs jeux de mots faits dans son émission de radio, enfin, bon, on pourra pour Noël s'acheter son livre dans lequel tout ceci est compilé) et de photomontages grossiers faits par un débutant sur Photoshop (voire au ciseau et à la colle, tellement ils sont visibles). Eh oui, en matière de blague, Ruquier n'a pas que l'humour des années 60, il en a les moyens techniques aussi !

Pour finir avec les émissions de Ruquier, petit retour sur un passage vu par hasard en zappant dans On a tout essayé. Posons le cadre : pas de Steevy Boulay, pas de Pierre Bénichou, pas de Christine Bravo, pas de Valérie Mairesse, pas de Jean-Bernard Hebey, donc pas de grosses perles a priori. Le reste de l'émission était d'ailleurs du classique (j'étais resté, pour la peine), on avait une séquence Enfants de la télé qui montrait des pubs sur Internet qu'on a déjà vu ailleurs, séquence présentée par un certain Jérémy Michalak, qui a un gros potentiel pour présenter des émissions du matin sur M6. On avait aussi les critiques cinéma par la fine équipe (Jérémy Michalak, donc, mais aussi Philippe Vandel, Claude Sarraute, Isabelle Mautrot, Gérard Miller et Elsa Fayer, belle liste) sur la seule base des affiches, bref, le ronron habituel. Alors, que s'est-il passé de si particulier au début de l'émission ? Au moment où j'ai pris l'émission, Gérard Miller se lançait dans une de ses diatribes impitoyables qui font frémir le bourgeois, à l'encontre de l'invité, Marc-Edouard Nabe. Le début du réquisitoire de notre Fouquier-Tinville était une étude sociologique des membres du Figaro, se séparant selon Miller en neuneus, en types biens comme Zemmour (slurp au patron, en passant) et en salauds lumineux comme Nabe. Il sort alors un ancien livre de Nabe et en lit des extraits qui n'appellent pas vraiment à l'amour entre les peuples, reconnaît un bon style littéraire mais c'est pour mieux condamner les mots utilisés, lance une pique contre Lucchini pour avoir vanté le génie de Céline (Louis-Ferdinand, pas Dion) et poursuit sa diatribe avec force et ne tarit pas de virulence. La pendaison immédiate, on n'a pas le droit à l'antenne, mais on sent qu'il aimerait bien. Bizarrement, Nabe n'a pas apprécié, il répond qu'il n'est pas venu pour se faire insulter, que lui et son éditeur avaient hésité à venir devant le peu d'intérêt pour lui par rapport aux risques et se taille.

Mais, dans son cours temps de parole, Nabe a osé affirmer que l'émission de Ruquier ne faisait pas vendre de livres et ça, le binoclard n'a pas aimé, tout comme il n'avait pas aimé quand, dans On n'est pas couché, Jean-Louis Murat avait critiqué en terme très fin (comme toujours avec lui) la patronne de Closer et Ruquier aussi, pour l'avoir invitée. Là, de même, pas de critique admise sur son émission, il dit alors que les éditeurs le harcèlent pour faire venir leurs poulains dans son émission, ce qui est bien la preuve qu'elle a un réel impact sur les ventes. Arguments qu'utilisait déjà Ardisson à l'arrêt de Tout le monde en parle, appelant le monde de l'édition à la rescousse pour le bien de la littérature française et qui avait fait un gros flop. Admettons que Ruquier ait raison (ce qui voudrait dire que des gens vont au cinéma voir un certain film car Elsa Fayer a bien aimé l'affiche, mais bon, admettons), comment peut-on alors expliquer la discrétion de nombre de gros vendeurs dans ce genre d'émission ? En effet, les Dan Browm, Marc Lévy, Bernard Werber et compagnie, qu'on aime ou pas, font partie des principales ventes sans courir les plateaux télés tandis que les échecs des invités récurrents de ces émissions ne se comptent plus tellement les cas sont fréquents. Allez, un bon tchikaboum et on oublie.

Publié dans telepoubelle

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L
Je ne jugerai pas la qualité de l'émission de Ruquier, moi-même n'étant pas spécialement friand de son humour, et je regarde peu la télé par ailleurs.<br /> Juste pour préciser comment s'organise cette émission : le travail commence la plupart du temps en début d'après-midi et se fait dans l'urgence. Les auteurs apportent leur texte et on a quelques heures pour faire les rendus. Quand y'a plusieurs photomontages, il faut compter la recherche d'images fastidieuse (avec parfois des images de piètre qualité parce qu'on a que ça et pas le temps de chercher), et le fait que l'équipe "artistique" veut que ça fasse gag, que ce soit souvent volontairement grossier. Combien de fois ai-je entendu "c'est trop bien fait, faut qu'on voit que c'est un montage".  Faut l'immédiateté du "comique", pas que ce soit une vitrine de mes capacités. Sans compter les modifications de dernière minute... Il m'est arrivé d'avoir une quinzaine de photomontages à réaliser en 5 heures ! Bref le temps, les désidératas "artistiques" ainsi que les directives jouent contre moi (je suis tout seul à mon poste). C'est désolant mais c'est comme ça.<br /> Rassurez vous à côté, je suis un graphiste et dessinateur occupé qui s'épanouit dans ses créations.<br /> Tout ça pour dire que parfois, il faut faire attention, ce petit laïus sur le "débutant sur Photoshop" est blessant. Il faut voir comment est le milieu de la télé, c'est un sous vivier très à part (empli, je vous l'accorde, de nombre d'anencéphales, ce qui explique la médiocrité des programmes). Moi-même, ayant quelques projets, je me déséspère du niveau du média et de son nombrilisme vieillot (j'utilise souvent l'allusion à l'Almanach Vermot que vous citez ici avec finesse).<br /> Bref, fustigez la télé, les animateurs mais pas les "petites mains" qui font ce qu'elles peuvent vu les conditions de travail.<br /> Je retourne à mes ciseaux et à ma colle UHU.<br /> Cordialement,<br /> Evidemment je ne donne pas mon identité, je ne veux pas de polémique ni de problème. De toute façon, je ne suis pas dur à trouver.
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B
Fogiel ne s'est vraiment pas fait chier puisqu'il s'est plagié lui-même, T'empêche tout le monde de dormir est l'exacte réplique de Tout le monde en parle<br /> <br /> heuu... y'a comme une erreur, en même temps ce que tu ecris est vrais aussi mais si je ne m'amuse Tout le monde en parle c'est une emission d'Ardisson à la base, non ?<br /> Suis un peu, au moins...
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L
Tania Brunarosso la dernière chroniqueuse du GJ. Transfuge de Radio Nova sur Canal (comme Debouze, Baer & co). Une voix radiophonique fantasmatique, un physique en nette inadéquation avec la voix sus-citée précédemment.
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